Si l’enregistrement d’une marque française confère à son titulaire des droits exclusifs sur celle-ci, des négligences peuvent très largement obérer l’effectivité de cette protection.
Les faits, ici comptés, sont assez complexes.
Deux sociétés se reprochaient, mutuellement, des dépôts de marques françaises similaires désignant des services identiques.
Par « tirs croisés », l’une et l’autre se prévalaient de l’annulation des marques adverses.
La société titulaire des premières les avait déposées en 2011 et 2012, tandis que la seconde, qui exploitait le signe à titre de nom commercial depuis 2008 au moins, avait déposé une marque éponyme en 2015.
La marque déposée en 2015 a été, effectivement annulée au visa de l’article L 711-3 du code de la propriété intellectuelle, selon lequel ne peut être enregistrée, ou si elle l’a été, doit être déclarée nulle une marque identique ou (dans certaines circonstances) similaire à une marque antérieure.
Le titulaire de ladite marque protégée en 2015, s’opposait pourtant à cette demande de nullité et formulait lui-même le grief d’annulation des marques de 2011 et 2012, pensant que l’usage qu’il faisait d’un signe identique à titre de nom commercial, depuis 2008 au moins, le mettait à l’abri de tout reproche.
Il était, il est vrai, le premier à avoir exploité le signe dont il était question.
L’argument était pertinent sur le principe mais il a, toutefois, été rejeté au motif qu’au moment de la formulation de ses griefs, il avait toléré l’usage des marques contestées depuis plus de cinq années.
Effectivement, l’article L 716-2-8 du code de la propriété intellectuelle prescrit que le titulaire d’un droit antérieur (qui peut être un nom commercial) qui a toléré pendant une période de cinq années consécutives l’usage d’une marque postérieure enregistrée en connaissance de cet usage, n’est plus recevable à poursuivre l’annulation de ladite marque postérieure.
Deux enseignements doivent être tirés de cette illustration jurisprudentielle :
En premier lieu, il est impératif de faire précéder un éventuel dépôt de marque, d’une recherche approfondie d’antériorités afin de s’assurer qu’elle ne portera pas atteinte à des droits antérieurs (marques, dénominations sociales, noms commerciaux…) et éviter des contestations à venir.
En second lieu, l’enregistrement d’une marque doit, tout aussi nécessairement, être suivi d’une veille régulière permettant d’identifier des atteintes à ses propres droits, lesquelles ne peuvent plus être poursuivies lorsque leur usage a été toléré durant cinq années.
Le cabinet ORATIO AVOCATS est en mesure de vous assister à ces deux titres.
Anne-Laure LE BLOUC’H
Avocat associé
al.leblouch@oratio-avocats.com